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Altawabi's blog
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  • "Comme c'est triste de croire qu'on va être compris..." De bavardages inutiles en réflexions sans grand intérêt, en passant par les coups de blues... Des mots, de quoi tenter de se faire comprendre, mais sans grands espoirs...
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18 juin 2006

Encore un qui a tout compris

Une fois le bac passé, il fallait bien que je vous livre ce texte... Je crois, de tous ceux qu'on a étudiés cette année, c'est peut-être celui qui m'a semblé... le plus vrai, en fait.
Etudié dans le cadre de l'autobiographie : est-il possible de dire la vérité sur soi ?
Je n'ai jamais autant eu le sentiment de "lire la vérité" qu'en étudiant ce texte...
La vérité...

Roland Barthes - Roland Barthes par lui-même (extrait)

Le Livre du Moi

Ses "idées" ont quelque rapport avec la modernité, voire avec ce qu'on appelle l'avant-garde (le sujet, l'Histoire, le sexe, la langue) ; mais il résiste à ses idées : son "moi", concrétion rationnelle, y résiste sans cesse. Quoi qu'il soit fait apparemment d'une suite d'"idées", ce livre n'est pas le livre de ses idées ; il est le livre du Moi, le livre de mes résistances à mes propres idées ; c'est un livre récessif (qui recule, mais aussi, peut-être, qui prend du recul).
Tout ceci doit être considéré comme comme dit par un personnage de roman - ou plutôt, par plusieurs. Car l'imaginaire, matière fatale du roman et labyrinthe des redans, dans lesquels se fourvoie celui qui parle de lui-même, l'imaginaire est pris en charge par plusieurs marsques (personnae), échelonnés selon la profondeur de la scène (et cependant personne derrière). Le livre ne choisit pas, il fonctionne par alternance, il marche par bouffées d'imaginaire simple et d'accès critiques, mais ces accès eux-mêmes ne sont jamais que des effets de retentissement : pas de plus pur imaginaire que la critique (de soi). La substance de ce livre, finalement, est donc totalement romanesque. L'intrusion, dans le discours de l'essai, d'une troisième personne qui ne renvoie cependant à aucune créature fictive, marque la nécessité de remodeler les genres : que l'essai s'avoue presque une roman : un roman sans noms propres.

La loquèle

Ce juin 1972, curieux état : par fatigue, dépression énervée, une loquèle intérieure me saisit, un bombardement de phrases ; c'est-à-dire que je me sens à la fois très intelligent et très vain.
C'est tout le contraire de l'écriture, parcimonieuse dans la dépense même.

Lucidité

Ce livre n'est pas un livre de "confessions" ; non pas qu'il soit insincère, mais parce que nous avons aujourd'hui un savoir différent d'hier ; ce savoir peut se résumer ainsi : ce que j'écris de moi n'en est jamais le dernier mot : plus je suis "sincère", plus je suis interprétable, sous l'oeil d'autres instances que celles des anciens auteurs, qui croyaient n'avoir à se soumettre qu'à une seule loi : l'authenticité. Ces instances sont l'Histoire, l'Idéologie, l'Inconscient. Ouverts (et comment feraient-ils autrement ?) sur ces différents avenirs, mes textes se déboîtent, aucun ne coiffe l'autre ; celui-ci n'est rien d'autre qu'un texte en plus, le dernier de la série, non l'ultime du sens : texte sur texte, cela n'éclaircit jamais rien.

***

J'aime ce texte.
"Le livre du Moi, le livre de mes résistances à mes propres idées."
Comment tout dire ! Comment dire que ce Moi ne se limite pas à "des idées", qu'il est beaucoup plus... et beaucoup plus complexe...!
Un personnage de roman ! Ou même plusieurs ! C'est dire : l'image qu'on se construit de soi n'est jamais que purement imaginaire ! et de plus... on n'est jamais le même nous-même ! Et chaque fois l'on se forge un masque, et qui n'est jamais le même ; comme un système, une "définition" du moi (et qui peut se cacher derrière des mots... ces façades... je suis "triste", "égoïste", "altruiste", "pessimiste", "optimiste"...), toujours changeant selon les circonstances, la "profondeur de la scène", et derrière ces systèmes, construits par notre imaginaire, il n'y a jamais... RIEN ! PERSONNE !... (au secours, je me moi...)
La loquèle... (=> "monologue intérieur du sujet amoureux qui ressasse les effets douloureux d'une conduite donnée.") Et... "Je me sens à la fois très intelligent et très vain"... Très intelligent de retrouver, de reconstruire pourquoi, analyser la situation, schémas, tous très réfléchits, très... tout ça. Et pourtant... quelle utilité...? Ces schémas ont-ils une incidence sur ce qui se passe ? N'en existe-t-il pas mille aussi intelligents les uns que les autres ? A quoi bon... à quoi enfermer les choses dans des systèmes...
Rha ! Abattement amoureux !
Et puis, lucidité : "ce que je dis de moi n'en est jamais le dernier mot", eh oui ! toujours de nouvelles idées, on revient sur ce qu'on dit, sur ce qu'on écrit, on se contredit, parfois ! Toujours de nouvelles choses à dire, on ne peut jamais s'enfermer dans une définition non plus... On aura beau essayer... Chaque texte n'est qu'un "essai", une pensée prise sur le vif, une de ces idées à laquelle on résiste, et puis, cela devient un texte : petit morceau échappé de soi, détaché, mais soi ? Jamais. Jamais, jamais, le moi est insaisissable...
Et comment le saisir mieux qu'en disant, justement... tout ce qu'en dit Barthes ? :D


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